Le 22 février 2021 par Yves Leers

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Grenada, rising seas, UNEP, 2015. CC BY 2.0

« Faire la paix avec la nature » : c’est le nouveau cri d’alerte du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) qui demande à la communauté internationale de « changer sa vision du monde en plaçant la nature au cœur de la prise de décision », dans un rapport qui vient d’être publié à Nairobi (Kenya), siège du PNUE. Qui entendra ce cri après tant d’autres ?

 

« Notre guerre contre la nature a brisé la planète, écrit le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, dans l’avant-propos. Mais ce rapport nous guide également vers un chemin plus sûr en proposant un plan de paix et un programme de reconstruction après la guerre. Il s’agit là de la clé pour parvenir à un changement porteur de transformation, les plans de relance après la COVID-19 étant une occasion d’investir dans la nature et d’atteindre Zéro émission nette à l’horizon 2050 », explique-t-il. Déjà, en décembre 2020, le secrétaire général de l’ONU avait affirmé que « faire la paix avec la nature sera la grande œuvre du 21ème siècle. La guerre contre la nature est suicidaire. Ce doit être la priorité absolue. Partout et pour tout le monde ».

 

Dans ce rapport, le PNUE – alias ONU-Environnement – explique que « le monde peut transformer sa relation avec la nature et s’attaquer aux crises du climat, de la biodiversité et de la pollution simultanément afin d’assurer un avenir durable et prévenir de futures pandémies ». S’appuyant sur les travaux du GIEC (climat) ou de l’IPBES (biodiversité), les auteurs affirment qu’il faut « innover et investir uniquement dans des activités qui protègent à la fois l’être humain et la nature ». Parmi ses propositions, le rapport propose « l’inclusion du capital naturel dans les mesures de performance économique [à la place du PIB, ndlr], un prix pour le carbone et le transfert des milliards de dollars de subventions des combustibles fossiles, de l’agriculture non durable et des transports vers des solutions à faible teneur en carbone et respectueuses de la nature ». Enfin, conclut le rapport, il faut que « les individus reconsidèrent leur relation avec la nature, changent leurs habitudes pour réduire leur utilisation des ressources naturelles, réduisent le gaspillage de nourriture, d’eau et d’énergie, et adoptent enfin des régimes alimentaires plus sains ». Beau programme ou vœu pieux ?

 

Le PNUE est la seule agence des Nations unies dédiée à l’environnement et au développement, la seule installée en Afrique, comme un symbole de l’aide au développement. Elle a été créée en 1972 à la Conférence de Stockholm, premier Sommet de la Terre, né du rapport du Club de Rome « Les limites de la croissance ». Le PNUE et l’OMM (Organisation météorologique mondiale) ont créé en 1988 le GIEC, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.

 

« Nous avons toutes les solutions en mains pour faire face à la triple urgence planétaire et assurer l’avenir de l’humanité », conclut le rapport. Toutes les solutions, mais pas tous les outils.

 

Le PNUE, presque inconnu du grand public, est un « programme » et non une « organisation » ce qui, par exemple, le prive de tout rôle dans la définition des stratégies et normes environnementales. La solution ? Que le PNUE devienne « l’Organisation des Nations unies pour l’environnement », mais l’Assemblée générale des Nations unies n’a jamais jugé utile de lui conférer ce vrai rôle, alors que les menaces environnementales et climatiques n’ont jamais été aussi fortes. Autre choix stratégique possible : créer une Agence de l’ONU commune entre le PNUE et le PNUD, le Programme des Nations unies pour le développement, qui n’est pas non plus une « organisation » mais qui distribue de nombreux financements. Il s’agirait d’une Organisation des Nations unies pour le développement et l’environnement (ONUDE), dont l’influence pourrait être démultipliée.

 

Mais l’horloge des choix écologiques onusiens est restée bloquée aux années 1970.